Piste ski Bosses - Messieurs

Piste ski Bosses - Messieurs

Les Canadiens Alexandre Bilodeau (à droite) et Mikaël Kingsbury (gauche) ont été à la hauteur des attentes placées en eux, lundi, en signant un doublé dans l'épreuve des bosses des Jeux olympiques de Sotchi.

Bilodeau, âgé de 26 ans, est devenu le premier bosseur à défendre avec succès son titre olympique en remportant la descente des Jeux de Sotchi, disputée dans des conditions difficiles sur la piste du Parc extrême Rosa Khutor.

Il a réussi ses deux sauts et a obtenu 26,31 points de la part des juges, pour devancer Kingsbury par 1,6 point. Le Russe Alexandr Smyshlyaev a mis la main sur la médaille de bronze grâce à ses 24,34 points. Il a ainsi privé le Canada d'un balayage, puisque Marc-Antoine Gagnon a terminé quatrième.

L'autre Québécois en lice, Philippe Marquis, a été éliminé lors de la dernière étape avant la grande finale et il a pris le neuvième rang.

Il faisait chaud en montagne lundi et la piste était en bien piteux état, particulièrement en après-midi lors des qualifications. Bilodeau avait connu des difficultés lors de ses deux premières descentes dans les finales, chutant même au huitième rang après la première étape. Il a toutefois été parfait lors de sa dernière descente et il a pu monter à nouveau sur la plus haute marche du podium, comme il l'avait fait quatre ans plus tôt à Vancouver, quand il était devenu le premier Canadien à remporter l'or en sol canadien.

«J'ai réussi la meilleure descente de ma vie», a déclaré Bilodeau, qui en est à ses derniers Jeux. «La seule chose que je me disais en haut de la piste, c'était de ne pas avoir de regrets. (Kingsbury) m'a tellement poussé au cours des dernières années, je me suis dit que j'y allais pour le premier rang ou le sixième.»

Kingsbury, le rival de Bilodeau sur le circuit de la Coupe du monde, a commis une petite erreur en grande finale et c'est ce qui l'a empêché d'obtenir un score suffisant pour décrocher l'or.

Leur domination sur leur sport est si forte qu'ils ont remporté chaque compétition cette saison. Kingsbury a remporté les trois premières étapes de la Coupe du monde, alors que Bilodeau a suivi avec des victoires lors des trois suivantes, avant son triomphe de lundi à Sotchi.

Leur doublé olympique survient deux jours après celui des soeurs Justine et Chloé Dufour-Lapointe.

 

Deux hommes, une rivalité, une philosophie… deux médailles

 Dans le coin bleu, Alexandre Bilodeau, champion olympique aux Jeux de Vancouver. Dans le coin rouge, Mikaël Kingsbury, champion du monde. 

Les deux meilleurs bosseurs au monde. Deux fiers compétiteurs qui se battent toujours pour la même chose : la première place rien de moins. 

Depuis le début de la saison, ils n’ont laissé que des miettes à leurs rivaux. Kingsbury a enlevé les trois premières Coupes du monde, Bilodeau les trois dernières. 

Cette série 4 de 7, comme l’avait déclaré Kingsbury à la suite de sa 2e place à Val St-Côme, allait se jouer nulle part ailleurs que sous les feux de la piste olympique de Sotchi. 

Pas pour rien que littéralement le village de montagne s’est vidé de tous ses athlètes canadiens. Erik Guay, Manuel Osborne-Paradis, Alex Beaulieu-Marchand, les lugeurs, les équipes de bobsleigh, bref tout ce beau monde ne voulait rater de cet ultime duel digne de la bonne vieille rivalité Canadien-Nordiques. 

Parce que rivalité, oui il y a même si les deux athlètes portent les couleurs du même pays. Une rivalité qui a monté d’un cran depuis le titre mondial de Kingsbury à Voss en mars dernier. Pour l’un, elle paraissait plus que l’autre à tout le moins. 

Médaillé d’argent, Bilodeau avait alors critiqué l’évaluation des juges sur son deuxième saut. Ils l’avaient privé du seul titre qui manque à son palmarès. Après sa victoire en bosses en parallèle deux jours plus tard, il a affirmé à qui voulait bien l’entendre que bon nombre d’entraîneurs lui avaient dit qu’il méritait la victoire en simple. 

L’athlète de Rosemère avait même poussé la note jusqu’à écrire sur Twitter : «Champion du monde aujourd’hui. Je suis vraiment satisfait de mes performances cette semaine. Au fond de moi, je sais que je quitte la Norvège avec deux titres.» 

Arrogant, comme le sont souvent les grands champions. 

Cette sortie avait jeté une douche froide sur l’équipe canadienne de bosses et bouleversé Julie Thibodeau, la mère de Kingsbury. À un point tel que lors d’un souper d’équipe le même soir, les parents de Kingsbury ont quitté la table quand Bilodeau est entré dans la pièce. 

Bilodeau en a rajouté une couche en janvier dernier au terme de sa 2e position à Calgary. Il a de nouveau visé les juges qui, estimait-il, accentuaient l’écart entre les notes de Kingsbury et les siennes.  

Se nourrir l'un de l'autre 

Un autre athlète aurait possiblement mal réagi ou mal géré cette pression interne. Outre son calme désarmant, la grande force de Kingsbury réside dans sa capacité à rester imperméable à toutes distractions. 

Rapidement, il a fait une croix sur l’épisode de Voss. Et il ne s’est jamais préoccupé de celui de Calgary. 

Là où certains y voient une rivalité malsaine au sein d’une même équipe, les deux principaux protagonistes s’en nourrissent. Une rivalité qui les pousse à devenir meilleurs et à creuser l’écart avec le reste de la planète bosses, ont expliqué leurs entraîneurs respectifs. Sur neige, ils ont chacun leur emploi du temps, mais au gymnase, ils partagent les mêmes spécialistes du groupe B2Dix. 

«Sans lui, je n’aurais jamais livré une descente comme ça aujourd’hui. J’ai eu la descente de ma carrière. Il n’y avait que lui qui pouvait me déloger», a déclaré Bilodeau après sa victoire. 

«Je fermais les Jeux olympiques. Alex m’a mis beaucoup de pression. Je pense que c’est probablement sa meilleure descente à vie», a renchéri Kingsbury. 

Pour comprendre la philosophie des deux bonshommes, il faut savoir ce qui s’est passé entre leurs deux oreilles avant leur ultime descente. Quatrième des six derniers finalistes à s’élancer, Bilodeau a joué le tout pour le tout après deux descentes en deçà de ses attentes et de son talent. Ça passe ou ça casse. Il finit 1er ou 6e, un point c’est tout, et il en accepte les conséquences. 

Le destin a joué en sa faveur. Il a reconnu qu’il aurait pu être l’un de ceux qui sont sortis de piste. 

Kingsbury a opté pour la même approche. Pas question de participer aux JO pour finir 2e, 3e ou 4e. La victoire ou rien d’autre. 

Voilà l’attitude des champions. Une attitude qui jadis manquait aux athlètes canadiens, a-t-on souvent reproché. Une qualité indissociable de la rivalité. 

Combien de fois le Canadien a-t-il disputé ses meilleurs matchs contre les Nordiques en séries et vice-versa? Des rencontres qui tenaient les spectateurs sur le bout de leur siège. Que dire de la rivalité entre Roger Federer et Rafael Nadal qui a donné lieu à des matchs d’anthologie? 

Et c’est exactement ce que nous ont réservé Bilodeau et Kingsbury lundi soir. Il n’y a personne qui est sorti du Parc extrême déçu du spectacle. 

Et pour la petite histoire, non, Kingsbury n’enlèvera pas ses dessins des anneaux olympiques au-dessus et à côté de son lit. Pas tant qu’il n’aura pas gagné l’or en 2018. Bilodeau lui a déjà prédit.

                                            KRASNAÏA POLYANA

 


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